Europe de l’Est

La traversée à pied d’Istanbul jusqu’en Italie en suivant les différents massifs de Bulgarie puis les Carpates (Roumanie, Ukraine, Slovaquie…) et les Alpes autrichiennes : l’itinéraire, des conseils pratiques, étapes, dénivelés, traces GPS.


4 mois de marche, 3800 kilomètres de la Turquie à la frontière italienne par la Bulgarie, Roumanie, Ukraine, Slovaquie et Autriche et des passages, plus ou moins long en Grèce, Serbie, Pologne, République Tchèque et Hongrie. Douze pays et même deux continents avec un départ symbolique sur la rive asiatique du Bosphore.
Une marche pour l’essentiel de l’autre côté de l’ancien rideau de fer. Europe Centrale, Europe de l’Est, Mitteleuropa… ces pays aux frontières mouvantes ont été pris en étau entre des empires puissants. Ils ont retrouvé leur indépendance au cours des 150 dernières années. Ils sont aujourd’hui à un moment clé de leur histoire : guérir des blessures de ce passé tourmenté, consolider la démocratie, développer l’économie pour combler l’écart avec l’occident et s’ancrer (ou pas) à l’Europe de l’ouest.
Douze pays, hors et dans l’Union Européenne, alphabet cyrillique ou latin, douze langues, de multiples minorités, une longue partie dans le monde orthodoxe mais aussi des régions catholiques (gréco-catholique, uniates…), protestantes et l’islam (sunnites, alévis…) au début…
C’est un ensemble très multi-culturel que j’ai traversé mais avec un fil conducteur : les montagnes. Une fois passé la période d’échauffement en Turquie, j’ai marché presque en permanence dans une succession de massifs (Rhodopes, Pirin, Rila, Balkans, Carpates, Tatras, Alpes…). Cela a été à nouveau un défi physique avec plus de kilomètres et de dénivelés que les années précédentes.

Le parcours

Turquie-Grèce
J’ai symboliquement commencé à Istanbul côté Asie des rives du Bosphore. La traversée de l’Asie en Europe est toujours un moment très fort. Pour rejoindre les montagnes bulgares, j’ai traversé la Thrace turque avec un petit crochet pour effleurer le rivage de la Mer Noire. Ce début a été un bon rodage avec peu de relief et beaucoup de villages pour goûter à l’hospitalité turque et un très bref passage en Grèce à la fin.
Bulgarie-Serbie
A l’arrivée en Bulgarie, j’avais 400 kilomètres dans les jambes pour attaquer la traversée du pays par tous les massifs montagneux : Rhodopes, Pirin, Rila, Vitosha et Balkans avec un passage par la capitale Sofia. J’y étais la deuxième quinzaine de mai, trop tôt pour un passage en altitude dans le Pirin. J’ai trouvé de la neige dans tous les massifs au-dessus de 2000 mètres d’altitude. Cela m’a conduit à certains aménagements de parcours. Pour traverser le Danube à l’endroit où il transperce les Carpates, aux Portes de Fer, j’ai marché une petite semaine en Serbie.
Roumanie
Après 1000 kilomètres en monde slave (Bulgarie et Serbie), j’ai découvert la latine Roumanie sur près de 1000 kilomètres. C’est le pays où j’ai marché sur la plus longue distance. Je suis resté en permanence dans la chaîne des Carpates et fait un demi cercle pour la suivre. J’ai eu plusieurs longues parties d’autonomie, dans des hautes montagnes, dans les Retezat et les techniques Făgăraș. Pour entrer en Ukraine par un poste frontière officiel, j’ai terminé mon parcours roumain dans la rurale et touristique région des Maramureș.
Ukraine
Une semaine avec 240 kilomètres a été nécessaire pour traverser les Carpates Ukrainiennes. Les montagnes y sont moins hautes et moins escarpées. La marche est plus facile presque en permanence sur des chemins et souvent balisés. Il y a aussi plus de villages. Cette semaine donne un bon aperçu de cette région avec des parties sur des crêtes herbeuses, des passages en forêt et des traversées de villages.
Slovaquie-Pologne-République Tchèque
Retour ensuite en Union Européenne, pour poursuivre mon parcours le long de la frontière entre la Slovaquie et la Pologne. Le début est assez facile dans la continuité du relief ukrainien avant, dans la partie centrale, la belle traversée des Hautes Tatras puis les Malá Fatra. Ensuite les Carpates progressivement s’abaissent le long de la frontière tchèque jusqu’à Bratislava, au bord du Danube.
Autriche-Hongrie-Italie
Comme l’année dernière où j’avais joué les prolongations avec un bout de Via Alpina. Après un bref passage en Hongrie à Sopron, j’ai poursuivi dans les Alpes Autrichiennes, en Styrie et Carinthie. Ce sont des moyennes montagnes et les chemins y sont faciles. Un petit dessert avec un demi-millier de kilomètres jusqu’à la frontière italienne.


Voir le détail des étapes, les traces GPS, ainsi que tous les renseignements sur la logistique (approvisionnement, hébergement, eau…) dans les pages consacrées à chacune des 6 parties de ma marche :


Informations pratiques :

Sites internet – autres marcheurs :
Précurseur sur la traversée à pied de l’Europe de l’Ouest à la Mer Noire, l’anglais Patrick Leigh Fermor décrit sa marche de Londres à Istanbul, entre les deux guerres, dans le livre Dans la nuit et le vent. C’est un ouvrage de référence très instructif sur cette région pendant cette période troublée.
Plus récemment, en 1992-1993, l’anglais Nicholas Crane réalise la traversée du Cap Finisterre en Espagne jusqu’à Istanbul en suivant les différents massifs (Pyrénées, Alpes, Carpates…). Il a publié son récit dans un ouvrage non traduit en français « Clear waters rising ».
La traversée des Carpates a été réalisée par Simon Dubuis en 2011.
En 2004 et 2013, Łukasz Supergan a traversé les Carpates à pied. Voir son site pour les informations.
En 2013, un français, Lodewijk Allaert a fait également cette traversée de Bratislava jusqu’à la frontière serbe. Il a publié son récit en 2019 aux éditions Transboréal, «La traversée de l’Europe sauvage».
En 2015, des roumains font la traversée intégrale des Carpates de la Serbie à l’Autriche.
En 2015 puis 2016, une tchèque, Vicky est allée via les Carpates jusqu’à Istanbul. En 2017, un tchèque a marché depuis son domicile jusqu’à Istanbul en suivant à peu près le même parcours que celui que le mien.
Deux français, Nil et Marie ont commencé en 2018 une traversée de l’Europe de l’extrémité sud du Portugal jusqu’à Istanbul sur deux années. Leur aventure est relatée sur leur site Deux Pas vers l’autre.
En 2019, 1 canadien a traversé l’Europe de la Mer Noire (Cap Emine en Bulgarie) à l’Atlantique (Cap Finisterre en Espagne) sur un itinéraire baptisé la Trans Européenne Alpine Route (TEAR).
Un français a réussi cette performance et est parti de Roumanie pour aller jusqu’au Portugal pour une traversée Carpates-Alpes-Pyrénées (CAP). Ses traces sont disponibles sur Visugpx.
En 2019, Poyerbany Włóczykij a réalisé la traversée des Carpates à pied en suivant ce tracé. Un autre polonais, Roman Ficek, Roman Ficek, coureur de trail a réussi la traversée de l’ensemble du massif en 40 jours.
En 2019 également, Michal Medek a traversé les Carpates de la République Tchèque jusqu’au Danube en Roumanie.. Il met beaucoup d’informations (trace GPS, eau, ravitaillement…) sur son site Transcarpathian.org.

Passages de frontières :
Voir plus de précisions dans chaque section du parcours
Espace Schengen : Grèce, Slovaquie, Pologne, République Tchèque, Autriche, Hongrie et Italie.
Union Européenne mais hors espace Schengen : Bulgarie et Roumanie.
Hors Union Européenne : Turquie, Ukraine et Serbie. Une carte d’identité à jour suffit pour la Serbie et la Turquie mais il faudra prendre le passeport pour l’Ukraine (visa non requis).

Dangers :
Tiques : j’ai fait le choix de me faire vacciner contre l’encéphalite à tiques. L’Europe de l’Est jusqu’en Suisse fait partie des secteurs touchés. Pour la maladie de Lyme, les régions traversées sont plutôt en zones à risque moyen (voir carte).

Rencontre matinale à la sortie de Băile Bálványos

Ours : il y a des ours dans pratiquement tous les pays traversés. Ils seraient 6000 en Roumanie… J’en ai vu deux. J’ai vu à plusieurs reprises des traces. Le premier a eu peur de moi et s’est enfui rapidement. La deuxième, à la sortie d’un village, semblait habituée aux hommes et ne paraissait pas être dérangée par ma présence. J’ai quand même évité de camper. Dans les passages sauvages, j’utilisais fréquemment le sifflet pour signaler ma présence.
Comme sur l’Appalachian Trail, avais 20 mètres de corde, un mousqueton et un sac étanche pour suspendre la nourriture en utilisant la méthode PCT (Pacific Crest Trail). Je l’ai finalement pas utilisé car je n’ai jamais campé en forêt.

Méthode PCT

Chiens : par précaution, vu ce que j’ai lu sur l’agressivité des chiens notamment en Roumanie, je me suis fait vacciner contre la rage.
Les chiens de bergers peuvent être très méchants. D’ailleurs, les bergers disent : celui-ci est mauvais et a souvent du mal à le contenir.
Mon expérience :
1 Meilleure solution, être d’abord repéré par le berger qui t’accompagne pour traverser la zone occupée par le troupeau
2 Marcher sans prêter trop d’attention à la meute qui te suit en aboyant
3 Un coup de sifflet. Mon sac à dos est astucieusement équipé d’un sifflet comme attache pectorale. Le sifflet a souvent arrêté la meute de chiens
4 Montrer le bâton mais sans agressivité sinon ils sont encore plus excités
5 J’avais toujours des cailloux avec moi
Malgré tout, la seule fois où j’ai été mordu, c’était dans le cas numéro un.


Le matériel

Je suis resté sur l’équipement de mon Appalachian Trail 2017 adapté lors de ma traversée des Balkans en 2018. Il m’a donné satisfaction. J’ai eu besoin de tout et n’ai manqué de rien. Il y a eu juste quelques légères variantes en changeant de marque sur certains équipements et en cherchant à optimiser pour se rapprocher des 8kg en poids de base hors eau et nourriture. Sans être un disciple de la marche ultra légère, ce poids me parait très raisonnable pour être autonome et pouvoir rester confortable par des températures légèrement négatives.
J’aurais pu parvenir aux 8kg en changeant les éléments lourds (sac à dos, tente, duvet, matelas de sol) par de nouveaux produits, aujourd’hui sur le marché et plus légers. Je suis resté avec ma tente. J’en suis content. Elle part pour sa quatrième année. Assez grande (sensée être pour deux), autoportante, double toit, elle permet d’être confortable quand on y est confiné, avec le sac à dos, par mauvais temps. Il existe maintenant des matelas de sol un poil plus léger, mais ce serait investir pour gagner, à peine, quelques grammes. Côté sac à dos, North Face avec son Hydra 38l autour de un kilo ou Salomon avec son Out Week 38+6l annoncé pour 815g mériteraient d’être testés.
J’ai par contre étudié en détail tout le reste pour gagner des grammes article par article et finalement porter 400 grammes de moins par rapport aux années précédentes.
Dans chacune des parties, j’ai mis des commentaires sur le « consommable » : les cartouches de gaz à visser avec valve filetée (type MSR, Primus, Coleman…), la nourriture…

Conseils pratiques, étapes, traces GPS, récit.